Le géoparc mondial de Dong Van
Le plateau karstique de Dong Van est une région montagneuse à la végétation luxuriante, sillonnée de rivières et de falaises abruptes dans la province de Ha Giang à l’extrême nord du Vietnam. Alors que les autres régions ont connu le développement économique et la vie moderne, dans cette région rurale, le temps semble ne pas avoir de prise. En effet, une vingtaine d’ethnies minoritaires vivent ensemble à l’écart des routes principales, dans des vallées couvertes de roches où les conditions de vie sont défavorables. Ainsi, les habitants ont conservé jusqu’à aujourd’hui leurs mode de vie en harmonie avec la nature et leurs caractéristiques culturelles transmises depuis leurs ancêtres.
Culminant à 1600m d’altitude, le plateau karstique de Dong Van, couvre une superficie de 2350 kilomètres carrés et se situe sur quatre districts : Quan Ba, Yen Minh, Dong Van et Meo Vac. Ce paysage naturel de chaînes de montagnes calcaires géantes et noires résulte d’une longue histoire géologique et témoigne de l’évolution de la croûte terrestre pendant près de 600 millions d’années. Ainsi, le plateau karstique de Dong Van est reconnu par l’UNESCO comme 77e membre du réseau mondial de géoparcs (GGP). Il est devenu le premier géoparc mondial au Vietnam et le deuxième en Asie du Sud-Est.
L’histoire du plateau karstique de Dong Van
Située sur la région frontalière, cette région fut aussi marquée par des événements historiques majeurs dont la résistance des peuples Hmong contre les envahisseurs. En effet, à partir du milieu du XVIIIe siècle, le plateau karstique de Dong Van devint la résidence de la communauté autonome Hmong. À la fin du XIXe siècle, les Français s’allièrent avec la dynastie Qing de Chine afin de s’emparer de la terre des locaux et installer leurs bases militaires.
Cependant, ils se heurtèrent à la résistance de la population locale. Les rébellions initiales ont été rapidement réprimées, mais la région est toujours restée opposée à l’influence des Français. Après une longue guerre, les Hmong et leur leader, Vuong Duc Chinh, contraignirent les Français à signer un traité de paix avec eux en 1913. Vuong Duc Chinh fut ensuite accepté comme roi et gérait donc la région autonome des Hmongs à Dong Van. Par la suite, il soutint Ho Chi Minh dans sa quête de l’indépendance vietnamienne.
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Le palais royal du roi Hmong, situé dans la vallée de Sa Phin du district de Dong Van, fut transformé en site touristique en 1993. Cet édifice fut réalisé pendant 9 ans de 1898 à 1907 et considéré à l’époque comme une construction grandiose. Construit à partir de pierres et de bois précieux, avec des gravures sophistiquées, pour un prix de 150 millions de pièces d’argent d’Indochine et équivalant aujourd’hui à environ 5 700 000 euros. Il représentait alors le symbole de pouvoir, de richesse et de prospérité du roi. Après une longue période, le bâtiment a été partiellement détruit mais conserve toujours sa forme originale qu’il est possible de visiter pour se plonger dans l’histoire de la région.
La culture sur les champs de pierres
Avec plus de 80% de sa superficie couverte de roches, le plateau karstique de Dong Van offre peu de place pour la production de ressources. En raison du manque de terres fertiles, la culture vivrière dans cette région stérile est plus limitée qu’ailleurs dans la province de Ha Giang. La terre rocheuse de Dong Van, offre donc peu de possibilité d’habitat. Pourtant, elle abrite aujourd’hui 17 groupes ethniques minoritaires. Mais ces ethnies ne manquent pas d’ingéniosité pour exploiter ce terrain.
Malgré des conditions de vie extrêmement difficiles, les ethnies de cette région ont toujours gardé courage et optimisme et utilisent leur habileté et leur ingéniosité afin de surmonter cet environnement. En fait, les habitants de cette région ne pouvaient vivre que de la culture du maïs. Les locaux ont dû combler les trous dans la pierre sur les falaises avec de la terre fertile pour y planter du maïs et quelques légumes.
Cette technique agricole unique de culture sur des champs de pierre constitue le moyen de subsistance principal pour la plupart des populations locales depuis des milliers de générations. Par la suite, les locaux ont aussi utilisé des pierres pour construire des berges, qu’ils ont remplies de terre fertile afin de former des petits champs de riz. Malgré des conditions climatiques sévères dans le nord, les champs de roches construits existent depuis des millénaires et résistent parfaitement à l’érosion.
Le plateau karstique de Dong Van, là où les pierres s’épanouissent
En plus du riz et du maïs, les habitants plantent des fleurs de sarrasin servant de source complémentaire de nourriture, pour la fabrication de gâteaux, d’alcools et de médicament traditionnel. Après la récolte du riz, d’octobre à novembre, les sarrasins fleurissent partout sur le flanc des montagnes rocheuses. Cette fleur de couleur rose et blanche s’adapte bien à ce terrain et est devenue un symbole du plateau karstique.
En effet, quand on mentionne la province de Ha Giang et les montagnes calcaires de Dong Van, on pense toujours aux vastes champs de sarrasin. Réputée comme « la fleur s’épanouissant sur les pierres », les fleurs de sarrasin couvrant les vallées et les falaises sont un magnifique spectacle naturel à ne pas manquer. Les meilleurs champs de sarrasin se trouvent généralement le long des routes sinueuses du plateau karstique, notamment sur la route vers Quan Ba, dans la vallée de Sung La et au pied du col de Ma Pi Leng.
Les paysages à couper le souffle du plateau karstique de Dong Van
Pour vous rendre au plateau karstique de Dong Van, vous aurez notamment la chance de parcourir les routes en lacets le long de montagnes vertigineuses. Ces routes, reliant les quatre districts du géoparc portent le nom de « route du Bonheur ». Elle est notamment légendaire pour les travaux incroyables réalisés par les jeunes volontaires et la population locale de 1959 à 1965. En effet, il y a plus de 50 ans, cette région n’était accessible par aucun chemin praticable. Des millions de personnes se suspendaient sur les falaises rocheuses avec des houes, des pelles et des outils rudimentaires à la main pour construire une route dédiée à la communication entre le centre et les régions reculées. La nouvelle route a notamment permis d’acheminer de l’eau propre, de l’électricité, d’accéder à l’éducation et de fournir du travail aux villages pauvres de la région. Elle fut donc une bénédiction pour ces populations isolées.
La route du Bonheur commence par « la Porte du Ciel » à Quan Ba avec la vue sur le panorama de la région montagneuse et notamment les collines jumelles. Reprise de la route sinueuse à travers les paysages de pierre jusqu’à la pente de Tham Ma, un véritable challenge pour les aventuriers. Située entre les districts de Yen Minh et Dong Van, c’est une pente à neufs virages consécutifs. La pente de Tham Ma, littéralement « l’évaluation du cheval », était utilisée comme son nom l’indique pour évaluer les chevaux. En effet, on utilisait autrefois le cheval pour transporter les marchandises. Les chevaux restant en bonne santé, après avoir parcouru cette pente raide et courbée, étaient gardés pour être élevés. Aujourd’hui, la pente n’est plus utilisée à l’évaluation de la puissance de cheval mais de la stabilité de conduite des motards ou des chauffeurs.
Enfin, pour atteindre Meo Vac, le dernier district du géoparc, on doit passer le col de Ma Pi Leng, l’un des cols les plus hauts et dangereux du nord du Vietnam. Culminant à 2000m d’altitude, il s’agit du toit du plateau karstique de Dong Van offrant une vue spectaculaire sur les gorges du canyon de Tu San, le plus profond canyon d’Asie du Sud-Est. Coulant en contrebas des falaises rocheuses abruptes du canyon, la rivière d’eau émeraude Nho Que est semblable à une bande de tissu serpentant au cœur des montagnes verdoyantes. Il est possible de descendre au cœur du canyon pour rejoindre la rivière Nho Que et embarquer pour une descente en eau vive en admirant le paysage naturel grandiose des montagnes sous un autre angle.
Entre nature et ethnies à Dong Van
Sur la route du Bonheur, il n’est pas rare de tomber sur des locaux qui marchent lentement en portant des hottes sur leur dos. Généralement, les habitants qui ne peuvent pas se permettre d’acheter de scooter, vont à pied au marché ou aux champs situés à environ une dizaine de kilomètres de chez eux. Ils vivent dans les maisons en bois perchées au milieu des montagnes ou regroupées en villages sur les sommets. Les sentiers étroits de la route principale nous mènent à ces petits villages ethniques nichés dans la montagne.
Vivant dans un vaste jardin de pierres, les gens utilisent ce matériau naturel pour construire de jolies clôtures de roches séparant les habitations, les jardins et les enclos à bétail de différents clans et familles. Leurs maisons sont généralement construites d’argile malaxée avec de la paille hachée, appelées nha trinh tuong (maison en torchis). Les villageois disent que les maisons de ce genre restent chaudes en hiver et froides en été. D’ailleurs elles les protègent des tempêtes et des inondations en raison de la structure d’argile devenant plus solide lorsqu’elle est trempée dans l’eau. Les maisons en torchis aux toits recouverts de mousses peuvent durer jusqu’à une centaine d’années à travers de plusieurs générations.
En plus de la culture, les habitants font des produits artisanaux pour gagner leur vie. Grâce à l’abondance des matériaux naturels, les habitants tissent eux-mêmes des outils nécessaires en bambou et des vêtements à partir de fils de lin ou de chanvre. À côté du gris du plateau calcaire, on est fasciné par les costumes traditionnels colorés des ethnies. Avec leur habileté et leur créativité, les femmes confectionnent de belles tenues décorées de motifs sophistiqués à l’aide de la technique du batik.
Assister à la fabrication du batik dans le village de Lung Tam du district de Quan Ba :
L’art du batik : une traditions ancestrale de l’ethnie H’mong
Les ethnies et leur culture intacte
Les locaux préservent leur identité culturelle et vivent toujours en harmonie avec la nature. Les régions montagneuses constituent un « paradis des enfants », on trouve des foules d’enfants partout. Les enfants, aux pieds nus et aux visages barbouillées, s’amusent souvent devant chez eux ou dans les champs. Ils sont curieux en voyant des étrangers et lorsque l’on les salue, ils sourient et nous agitent timidement leurs mains. Les enfants seront heureux de recevoir des bonbons, des outils d’apprentissage ou des vêtements comme un don des visiteurs.
Comme eux, les adultes peuvent également être timides au premier abord avec des invités étrangers mais ils sont toujours accueillants et souriants. N’hésitez pas de boire un verre de l’alcool de riz avec eux, puisqu’il s’agit de leur manière d’accueil avec leurs invités. Malgré la pauvreté, les peuples sont honnêtes et optimistes. Malgré des conditions de vie défavorables dans cette région rocheuse, les germes de bonheur s’épanouissent sur les pierres : le vert des rizières en terrasse et des champs de maïs, la couleur des marchés ethniques, des costumes et des sourires des peuples ethniques. Voilà ce qui fait toute la richesse de Dong Van.
Pour une immersion dans les paysages pittoresques du géoparc de Dong Van et la vie des ethnies minoritaires :